Plongée dans l'ombre des cépages lorrains : pourquoi restent-ils méconnus ?

17 avril 2025

Pour comprendre le relatif anonymat de certains cépages lorrains, il faut faire un bond dans le passé. La Lorraine a été, jusqu’au XIXe siècle, une région de vignes prospères. On comptait à l’époque près de 30 000 hectares de vignobles, selon des archives historiques. Les vins lorrains étaient alors appréciés jusqu’à la cour des rois de France.

Mais plusieurs facteurs ont contribué à leur déclin. À partir du milieu du XIXe siècle, le phylloxéra, ce terrible insecte destructeur, a ravagé une grande partie des vignes européennes, et la Lorraine n’y a pas échappé. S’ajoutent à cela les guerres mondiales, les changements industriels et les reconversions agricoles, qui ont réduit drastiquement les surfaces viticoles. Aujourd’hui, la Lorraine ne compte plus que quelque 200 hectares de vignes en AOC (appellation d'origine contrôlée), concentrées principalement dans le Toulois et le Pays Messin. Ce contexte historique a limité non seulement la production, mais aussi la transmission de la connaissance et la renommée des cépages locaux.

Résultat ? Alors que des régions comme la Bourgogne ou la Champagne ont pu redorer leur blason au XXe siècle, la Lorraine est restée à la traîne, et certains de ses cépages ont quasiment sombré dans l’oubli.

Avec seulement deux AOC viticoles reconnues – les Côtes de Toul et la Moselle – la Lorraine ne joue pas dans la même cour que des mastodontes comme la Bordeaux ou la Vallée du Rhône. Si la qualité est là, c’est la quantité qui pèche. Une production limitée signifie moins d’exposition sur les marchés nationaux et internationaux, et donc un rayonnement restreint.

Par exemple, le cépage auxerrois, un blanc typiquement lorrain, donne des vins tout en fraîcheur et en fruité. Mais il est souvent éclipsé par des cépages plus célèbres comme le chardonnay ou le sauvignon, qui dominent les étals des cavistes et les cartes des restaurants. De même, le pinot noir, autre cépage phare des Côtes de Toul, souffre parfois de la comparaison avec son illustre homonyme bourguignon, malgré son caractère distinctif marqué par la minéralité locale.

Et que dire des cépages encore plus confidentiels comme le gamay ou le pinot auxerrois (différent de l'auxerrois blanc), qui restent rares même au sein des domaines lorrains ? Ces variétés, bien que prometteuses, peinent à sortir de leur niche pour séduire un public plus large.

Un autre facteur à ne pas négliger est le manque de communication autour des cépages et des vins lorrains. Lorsqu’on évoque la Lorraine, le grand public pense davantage à ses quiches et pâtisseries qu’à ses terroirs viticoles. Ce déficit de notoriété est en partie lié à des moyens plus limités que dans d’autres régions, mais aussi à une image perçue comme moins "prestigieuse" du fait de son histoire contrastée.

Par ailleurs, certains cépages comme le gamay ou l’auxerrois sont cultivés dans d’autres régions françaises ou étrangères, ce qui crée une certaine confusion. Les vins lorrains peinent ainsi à s’imposer comme des références distinctes. Pourtant, les vignerons locaux ne manquent pas d’idées pour valoriser leur production ! Ces dernières années, on a vu émerger des initiatives comme des portes ouvertes dans les domaines, des salons des vins locaux ou des collaborations avec des chefs étoilés pour faire découvrir ces cépages oubliés.

Heureusement, tout n’est pas sombre dans le paysage viticole lorrain. Au contraire, les choses commencent à bouger ! De nombreux vignerons passionnés œuvrent au quotidien pour faire connaître ces cépages méconnus et sublimer leurs caractéristiques uniques.

Des accords mets-vins pour mettre en lumière ces cépages

Un moyen efficace de faire découvrir les cépages lorrains est de les associer à la table. Par exemple :

  • L’auxerrois, avec sa belle fraîcheur, se marie à merveille avec une quiche lorraine, un poisson en sauce ou une tarte aux mirabelles.
  • Le gamay, léger et fruité, relève parfaitement le goût d’une potée lorraine ou d’une terrine de gibier.
  • Enfin, le pinot noir, élégant et structuré, sublime un coq au vin ou une volaille rôtie.

Ces accords montrent à quel point ces cépages, bien qu’encore discrets, s’intègrent parfaitement dans la gastronomie régionale et même au-delà.

L’essor de l’œnotourisme

Pour séduire les curieux, la région mise également sur l’œnotourisme. De plus en plus de domaines ouvrent leurs portes pour des visites, des dégustations et des ateliers autour des cépages locaux. Le vignoble des Côtes de Toul, par exemple, offre un cadre magnifique pour une balade au vert, avec des panoramas à couper le souffle et des rencontres authentiques avec des producteurs.

Des initiatives pour valoriser le terroir

Enfin, des acteurs locaux œuvrent pour replanter et sauvegarder certains cépages anciens ou oubliés, redonnant une chance à toute une palette de saveurs à retrouver dans vos verres. Des projets collaboratifs entre vignerons, collectivités et amateurs de vin permettent également de raconter l’histoire de ces variétés locales et de leur redonner leurs lettres de noblesse.

Au fond, ce n’est pas vraiment un problème que certains cépages lorrains soient encore méconnus. C’est plutôt une opportunité pour les amateurs de vin en quête de nouvelles expériences ! Lever son verre d’auxerrois ou de gamay, c’est goûter un peu à l’histoire, à la passion des vignerons et à la singularité d’un terroir. Alors pourquoi ne pas venir en Lorraine, visiter nos vignes, papoter avec nos producteurs et repartir avec quelques belles bouteilles pour impressionner vos amis lors d’un prochain repas ?