Le climat et son impact sur les cépages lorrains : une histoire de terroir

5 avril 2025

Petit rappel géographique : la Lorraine, située au nord-est de la France, est connue pour ses hivers froids et ses étés relativement modérés. Ce climat semi-continental joue un rôle central dans l’expression des cépages locaux. Avec des précipitations réparties assez régulièrement sur l’année et une moyenne de températures estivales autour de 20 °C, ce sont ces conditions qui façonnent nos vignes et définissent la signature des vins de Lorraine.

Et là, attention : contrairement à ce que l’on pourrait penser, la Lorraine n’est pas une terre viticole récente. Les Romains y produisaient déjà du vin ! Cependant, le vignoble lorrain a connu des hauts et des bas, notamment avec l’arrivée du phylloxéra au XIXe siècle. Aujourd’hui, entre résilience climatique et retour aux sources, les vins lorrains, notamment ceux des Côtes de Toul et de Moselle, sont de plus en plus reconnus.

Depuis une vingtaine d’années, les viticulteurs lorrains doivent jongler avec une nouvelle donne : le dérèglement climatique. On observe une hausse moyenne des températures de 1,5 °C en Lorraine sur le dernier siècle (source : Météo France). Les hivers sont désormais un peu moins rigoureux, les étés plus chauds et les épisodes climatiques extrêmes, comme les gels tardifs ou la grêle, deviennent plus fréquents.

Mais que signifie cela pour nos cépages ? Prenons un exemple concret : le pinot noir, roi du vignoble des Côtes de Toul. Avec des étés plus chauds, la maturation des raisins s’accélère, ce qui peut modifier le profil aromatique des vins. Des notes de fruits rouges éclatants peuvent laisser place à des arômes plus compotés. Une caractéristique intéressante pour certains consommateurs, mais un vrai défi pour les vignerons en quête d’équilibre.

Autre exemple : la grêle. Lorsqu’un orage s’abat fin mai ou début juin, cela peut ruiner une récolte en quelques minutes. D’où l'importance pour les producteurs d'adopter des approches préventives, comme l’installation de filets anti-grêle ou l’usage de nouvelles pratiques agricoles.

En Lorraine, comme dans toutes les régions viticoles, les cépages sont les véritables « athlètes » du vignoble. Ils s’adaptent (ou non) aux contraintes climatiques. Alors, qui sont les stars locales ?

Le pinot noir

On l’a déjà mentionné : le pinot noir est une des fiertés des Côtes de Toul. Ce cépage, qui apprécie les climats frais, donne ici des vins rouges délicats et légers. Avec le réchauffement climatique, les vignerons doivent surveiller de près son cycle de maturation afin d'éviter des vendanges trop précoces.

Le gamay

Autre cépage emblématique, le gamay a une résistance remarquable face aux climats capricieux. Ses grappes baies passent mieux les saisons pluvieuses et contribuent à des vins aux notes de fruits rouges croquants.

Le auxerrois

Un petit bijou blanc, souvent assemblé ou vinifié seul. Ce cépage discret adore le terroir calcaire et les conditions fraîches de la Lorraine. Avec des années plus chaudes, il peut toutefois perdre une partie de son acidité naturelle, un atout pour les vignerons cherchant des équilibres aromatiques.

Faisons une petite plongée dans les coulisses des vignobles lorrains : que font les vignerons pour contrer les caprices météo ? Voici une liste de leurs principaux leviers :

  • Adapter les dates de vendanges : autrefois fixées plus tard, elles doivent être avancées au bon moment pour préserver l’acidité et l’équilibre des vins.
  • Replanter des cépages résistants : certains producteurs expérimentent avec des variétés plus tolérantes à la chaleur, comme le chardonnay ou même le riesling.
  • Améliorer la gestion de l’eau : avec des périodes de sécheresse plus fréquentes, des solutions comme le paillage des sols ou l’installation de rétentions d’eau voient le jour.
  • Introduire l'agroforesterie : planter des arbres dans les vignes pour créer de l'ombre et limiter l’évaporation de l’eau.

Si les défis climatiques sont réels, certains y voient aussi une chance… Avec des hivers moins rudes, des projets de « nouveaux » terroirs lorrains ont vu le jour. Par exemple, dans les zones autrefois trop froides pour la vigne, le réchauffement pourrait permettre d’étendre les vignobles ! Et pourquoi pas, dans quelques années, voir de jeunes domaines prospérer tout près de Nancy ou même au nord de Metz ?

Enfin, certains viticulteurs innovent en utilisant ces évolutions climatiques comme un tremplin pour créer des vins inédits, à la croisée des influences traditionnelles et modernes. Le terme "vins de climat" prend alors tout son sens ici.

En Lorraine, chaque millésime raconte une histoire du climat. Et les vignerons, véritables gardiens de notre patrimoine viticole, se montrent incroyablement résilients. Entre techniques modernes et savoir-faire ancestral, ils façonnent des vins authentiques malgré (ou grâce à !) les surprises que leur réserve Dame Nature.

Alors, la prochaine fois que vous dégusterez un vin des Côtes de Toul ou de Moselle, prenez un instant pour penser au ciel lorrain, à ses humeurs et aux mains des vignerons qui relient si harmonieusement terre et climat. Santé !